Revue de littérature comparée - N°4/2015

Problèmes d'histoire littéraire indienne

Revue de littérature comparée - N°4/2015

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Présentation

Laetitia ZECCHINI, « Crisis in Literary History » ? Du « nativisme » et du provincialisme,
et de quelques autres débats intellectuels en Inde, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 391-404.


Cet article s'intéresse à la manière dont les écrivains indiens contemporains envisagent le champ dans lequel ils se placent ou sont placés. Il interroge les débats virulents qui traversent, aujourd'hui en Inde, les milieux intellectuels et qui prennent pour objet l'histoire ou la critique littéraire — et leur « indianité » supposée.
Si un consensus semble émerger sur une certaine « amnésie » historique et sur la compartimentation croissante des planètes linguistiques et littéraires de l'Inde, cet article s'intéresse aux interprétations souvent opposées de cette « crise », et notamment au courant dit « nativiste » dont les écrivains-théoriciens (B. Nemade, G. N. Devy) prônent une histoire « indigène ».

Claire GALLIEN, Les orientalistes britanniques de la fin du XVIIIe siècle et la création du canon littéraire indien, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 405-418.

La redécouverte de la littérature indienne dans l'Europe de la fin du XVIIIe siècle et son influence sur les mouvements littéraires européens ont été largement étudiées. Cependant, le concept même de « littérature indienne » n'a pas été suffisamment problématisé. Titres et contenus sont étudiés sans considérer les transformations imposées sur les textes indiens avant leur circulation en Europe.
Empruntant aux travaux spécialistes de l'Asie du Sud et à la critique de l'Orientalisme, cet article analyse le processus de création du canon littéraire indien « en comparaison » avec l'Europe et les enjeux idéologiques d'une telle construction.

Pascale RABAULT-FEUERHAHN, Le fil de l'histoire : appropriations savantes de l'histoire littéraire indienne dans l'Europe du XIXe siècle, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 419-432.

Remonter le fil de l'histoire indienne fut l'objectif principal des savants européens étudiant la littérature indienne au XIXe siècle. Cet article analyse ce tropisme historico-ethnographique à partir d'exemples puisés dans le domaine germanique.
Dans cette perspective qui privilégiait le passé, la littérature était restreinte à la tradition sanskrite. Mais on y intégrait tous les types de textes, pour pallier l'absence supposée d'histoire politique par des repères d'ordre culturel. Mais alors que la grammaire comparée démontrait la parenté des langues indo-européennes, et que les études littéraires contribuaient à la construction des identités nationales en Europe, cette histoire culturelle était-elle encore celle de l'Inde ?

Claudine LE BLANC, Écrire l'histoire de la littérature indienne en France au XIXe siècle. De la fragmentation à la dissolution de l'objet, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 433-446.


Au XIXe siècle, alors que se multipliaient les traductions de corpus indiens inédits, pas moins de quatre histoires de la littérature indienne ont paru en France. Mais le choix commun d'une perspective chronologique est loin d'unifier le discours des quatre auteurs, deux savants (Joseph Garcin de Tassy et Albrecht Weber), et deux amateurs (Louis Énault et Jean Lahor). Les spécialistes ont conscience de construire un objet « littérature indienne » très en deçà de la diversité de la
production littéraire de l'Inde. Énault et Lahor imposent une unité éthique et spirituelle à une « littérature hindoue », où des genres entiers, et l'idée même de littérature, tendent à disparaître. Ces quatre ouvrages témoignent ainsi du caractère problématique de chacun des termes de l'expression « histoire de la littérature indienne ».

Catherine SERVAN-SCHREIBER, Folklore/littérature/orature : frontières et cloisonnements dans l'histoire littéraire indienne, RLC LXXXIX, n° 4, octobredécembre 2015, p. 447-460.


Cet article, qui part de l'expérience personnelle de recherche de l'auteur sur la littérature de l'Inde du Nord, retrace la généalogie des études sur les traditions orales indiennes en France. En évaluant la place de l'oralité dans l'histoire des littératures indiennes et les classifications retenues pour étudier ces corpus de textes, cet article restitue les étapes qui mènent à un décloisonnement entre « littérature », « orature » et « folklore ». Ce faisant, il appelle aussi à un décloisonnement entre
disciplines et aires culturelles, en montrant le rôle charnière de l'oralité, qui relève du champ littéraire tout autant que de l'anthropologie.

Claire JOUBERT, B.R. Ambedkar : la lutte dans les lettres, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 461-472.

B.R. Ambedkar constitue un point de fuite singulier à l'intérieur des lettres indiennes, elles-mêmes précieuses pour leurs effets centrifuges sur la pensée de « la littérature ». Habituellement étudié par les sciences sociales comme leader des Intouchables et figure majeure de l'histoire de l'Indépendance, il sera ici abordé par une poétique : comme générateur de la prise de parole dalit, il fait apparaître des perspectives dans l'histoire discursive du sous-continent qui dénaturalisent
les césures européennes entre lettres et sciences humaines et sociales.

Anne CASTAING, Women Writing in India : pour une histoire littéraire des femmes, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 473-484.

Les critiques féministes Susie Tharu et K. Lalita publient en 1991 une anthologie magistrale : Women Writing in India, qui vise à révéler les voix littéraires féminines de l'Inde, interroge les fondements même du genre (histoire littéraire ou anthologie ?), comme il interroge ceux de littérature indienne et d'écriture féminine. Au regard de cette anthologie, cet article a pour ambition de souligner les épineuses questions que rencontre une histoire littéraire militante, dont ici celle des visées
transnationales du féminisme occidental, pour montrer comment s'élabore un ethos subalterne qui témoigne de la diversité des formes d'oppression du sujet, qu'il soit femme, indien, littéraire, postcolonial et/ou vernaculaire.

Guillaume BRIDET, Rabindranath Tagore, première figure d'une histoire littéraire (vraiment) mondiale ?, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 485-496.

Dans le contexte de la remise en cause du nationalisme méthodologique et en s'appuyant sur l'oeuvre de Rabindranath Tagore, cet article identifie les conditions d'une histoire littéraire (vraiment) mondiale. Il ne cherche ni à établir l'anthologie de la littérature universelle (définie par la valeur littéraire des textes) ni à quantifier les flux de la littérature globale (définie par leur diffusion), mais à identifier une littérature qui est le fruit de fécondations croisées et qui dépasserait les idiosyncrasies
nationales : ce qu'on peut appeler littérature cosmopolite.

Katia LÉGERET, La transmission orale des fables du Pañcatantra au théâtre, entre l'Inde et la France : enjeux transtextuels et interculturels, RLC LXXXIX, n° 4, octobre-décembre 2015, p. 497-508.

Cette recherche se fonde sur une réalisation artistique dirigée par Katia Légeret à l'Université Paris 8 depuis 2010, avec des acteurs-danseurs professionnels français et indiens. Ils ont élaboré avec les étudiants une adaptation et une réécriture corporelle de plusieurs fables de Jean de La Fontaine inspirées d'histoires du Pañcatantra, à travers des codifications gestuelles très variées, avec
d'abord celles des théâtres indiens puis avec celles de leurs propres cultures. Ce type de « métissage » entre les langues, les rythmes musicaux et les gestes rend inséparables la créativité et la fonction critique de l'art par rapport à une lecture ethnocentriste de la littérature.

Biographies Contributeurs

Pierre Brunel

Pierre Brunel, membre de l'Institut universitaire de France de 1995 à 2005, est professeur de littérature comparée à l'université de Paris Sorbonne (Paris IV) depuis 1970. Il a orienté une partie de ses recherches sur l'étude des genres littéraires et en particulier sur le roman. Il y applique librement les méthodes de la littérature comparée, et en particulier celles qu'il a essayé de suggérer pour une mythocritique comparatiste.

Daniel-Henri Pageaux

Docteur d'Etat ès lettres (Université de Paris III-Sorbonne nouvelle, 1975). Hispaniste de formation, puis comparatiste (Université de Rennes, 1965-1975). Professeur de littérature générale et comparée à l'Université de Paris III-Sorbonne nouvelle. Membre du Comité Lesage au sein du CRLC (Centre de recherche en littérature comparée, Université de Paris-Sorbonne). Co-directeur de la "Revue de littérature comparée" et membre du comité de rédaction de diverses revues spécialisées (Thélème, Letterature di frontiera, Portulan, Mentalités). Romancier sous le pseudonyme Michel Hendrel..

Consulter la table des matières

Introduction par Claire Joubert et Laetitia Zecchini 

Articles
Laetitia Zecchini •  « Crisis in Literary History » ? Du « nativisme » et du provincialisme, et de quelques autres débats intellectuels en Inde
 
Claire Gallien • Les orientalistes britanniques de la fin du XVIIIe siècle et la création du canon littéraire indien

Pascale Rabault-Feuerhahn • Le fil de l'histoire : appropriations savantes de l'histoire littéraire indienne dans l'Europe du XIXe siècle
 
Claudine Le Blanc • Écrire l'histoire de la littérature indienne en France au XIXe siècle. De la fragmentation à la dissolution de l'objet

Catherine Servan-Schreiber • Folklore/littérature/orature : frontières et cloisonnements dans l'histoire littéraire indienne

Claire Joubert • B.R. Ambedkar : la lutte dans les lettres

Anne Castaing • Women Writing in India : pour une histoire littéraire des femmes

Guillaume Bridet • Rabindranath Tagore, première figure d'une histoire littéraire (vraiment) mondiale ?

Katia Légeret • La transmission orale des fables du Pañcatantra au théâtre, entre l'Inde et la France : enjeux transtextuels et interculturels

Résumés  
Abstracts  
Table annuelle 2015
 
Ce numéro spécial a été préparé par Claire Joubert et Laetitia Zecchini en liaison avec le Comité de Rédaction